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20/09/2007

Le Dahlia Noir – James Ellroy (1987)

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999a35c854bf385ba7fd92deaecb99a1.gifLe Dahlia noir avait un nom : Elizabeth Short. C'était une apprentie comédienne de 22 ans, retrouvée morte et atrocement mutilée dans un terrain vague de Los Angeles, le 15 janvier 1947. Quarante ans plus tard, le romancier James Ellroy s'inspire de ce fait divers et signe Le Dahlia noir, roman excessif, d'une rare noirceur, récit d'une double obsession : celle de deux flics qui se font littéralement ronger par ce meurtre sordide et leur enquête, et celle de l'auteur marqué à jamais par le meurtre non élucidé de sa mère, quand il avait 10 ans. Car résoudre l'énigme criminelle la plus célèbre d'Amérique n'est pas ce qui intéresse Ellroy, son but est d'exorciser son passé, son récit est cathartique (la postface du livre, rédigée par Ellroy en 2006, est très éclairante sur ce point). Découvrir la suite...

17/09/2007

Le Bal – Irène Némirovsky (1930)

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bbbad7dd592a3702e566f0f7307c5dcd.gifDébut du XXe siècle : les Kampf, "nouveaux riches", organisent un bal afin de se lancer dans le monde. Antoinette Kampf, quatorze ans, en révolte adolescente, rêve d'y assister, mais sa mère s'y oppose catégoriquement : «Apprends, ma petite, que je commence seulement à vivre, moi, tu entends, moi, et que je n'ai pas l'intention de m'embarrasser de sitôt d'une fille à marier...» Antoinette saisira une occasion providentielle de vengeance, sans l'avoir préméditée, mais celle-ci sera perfide et cruelle à souhait !

Le Bal est un court récit grinçant et drôle, au style précis et incisif, entre crise familiale et critique sociale. Il conte avec humour et cynisme les affres tragi-comiques de parvenus qui reçoivent pour la première fois des gens qu'ils méprisent et dont ils se savent méprisés : «Pour la première réception, du monde et encore du monde, le plus de gueules que tu pourras... A la seconde ou à la troisième, seulement, on trie...»

Irène Némirovsky dépeint aussi avec une grande justesse la rivalité mère-fille et l'âpre solitude de l'enfance, son incompréhension, son mépris et son rejet du monde adulte au moment d'y pénétrer : «Mais ils ne voyaient donc pas, aveugles, imbéciles, qu'elle était mille fois plus intelligente, plus précieuse, plus profonde qu'eux tous, ces gens qui osaient l'élever, l'instruire... Des nouveaux riches grossiers, incultes... Ah ! comme elle avait rit d'eux toute la soirée, et ils n'avaient rien vu, naturellement... elle pouvait pleurer ou rire sous leurs yeux, ils ne daignaient rien voir... une enfant de quatorze ans, une gamine, c'est quelque chose de méprisable et de bas comme un chien...»

Je me suis régalée du style vif et élégant d'Irène Némirovsky, et le seul reproche que je peux formuler contre son roman, c'est qu'il est bien trop court ! Je vais donc me précipiter sur Suite française...

  

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Irène Némirovsky, Le Bal, éd. Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, 2002 (1930), 120 pages, 6,50 €.

Les avis de Musky et de Cuné.

08/09/2007

Le Bestial Serviteur du pasteur Huuskonen - Arto Paasilinna (1995)

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d8a2bbf792f564dfae9303a19604d17e.gifLe pasteur Oskar Huuskonen est en charge d'un petit bourg rural de Finlande aux fidèles gentiment toqués. Il est de plus affligé d'une épouse acariâtre et ses frasques adultérines, sa foi vacillante et ses prêches provocateurs («Le Diable rôde parmi nous tel un lion rugissant ! […] Mais quand Dieu lui cingle l'échine de son fouet, il y a du poil qui vole et le Malin chie dans son froc !») lui valent les foudres de sa hiérarchie. Pour parfaire le tableau ses paroissiens lui offrent, pour son cinquantième anniversaire, un ourson orphelin qu'il baptise Belzéb, diminutif de Belzébuth. La suite est rocambolesque : chassé par sa femme puis par son évêque, mais toujours flanqué de son fidèle Belzéb, le pasteur prend le large.

Avec désinvolture Paasalinna bouscule toutes les règles de la vraisemblance, tout en restant dans un cadre réaliste, ce qui confère à son récit légèreté, fantaisie, humour et poésie loufoque. L'ours Belzéb voyage avec son maître en taxi, train ou paquebot, il apprend à se brosser les dents, à danser le gopak et à repasser les chemises, et même à mimer les gestes de piété : faire le signe de croix, joindre les pattes, s'agenouiller, lever le museau vers les cieux, tenir une bible, prendre une mine pieuse et avoir l'air de prier... Plus son maître s'éloigne de la religion, plus Belzéb semble trouver la foi ! Le pasteur et son ours cheminent ainsi en une quête spirituelle entre Dieu, diable et extraterrestres.

Cette fantaisie burlesque et grinçante n'est pas entièrement gratuite et la cible principale de cette satire est évidente : le fanatisme religieux et plus globalement les institutions religieuses («C'est comme ça aussi à la télévision : plus les émissions sont idiotes, plus elles font d'audience. L'Eglise doit vivre avec son temps et abaisser d'un bon cran le niveau intellectuel de son message»). Paasilinna brocarde aussi au passage les conventions sociales et l'hypocrisie ambiante avec beaucoup d'humour.

L'histoire est fantaisiste, les personnages loufoques, le style alerte, la satire cocasse et pourtant... je me suis ennuyée ! Je me suis vite lassée des péripéties du pasteur et de son ours pour finalement me désintéresser totalement de leur destinée.

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Arto Paasilinna, Le Bestial Serviteur du pasteur Huuskonen (Rovasti Huuskonen petomainen miespalvelija), traduit du finnois par Anne Colin du Terrail, éd. Denoël & d'ailleurs, 2007 (1995), 306 pages, 20 €.

Du même auteur : La douce empoisonneuse

Bernard, du blog des livres, a beaucoup plus aimé ce livre que moi.

06/09/2007

La nuit des temps - René Barjavel (1968)

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b51921eb64d66548b6c6cd4b8f030012.gifEn Antarctique, dans l'immense paysage gelé, les membres des Expéditions Polaires françaises font un banal relevé du relief sous-glaciaire quand leurs appareils sondeurs captent un signal : il y a un émetteur sous la glace ! Savants et techniciens venus du monde entier creusent la glace à la rencontre du mystérieux signal et découvrent les vestiges d'une civilisation engloutie, vieille de neuf cent mille ans. Cette civilisation, en avance sur la notre bien que plus ancienne, se sachant menacée par une guerre totale qui risquait de la détruire entièrement, a mis à l'abri dans une sphère d'or un homme et une femme susceptibles de faire renaître la vie après le passage du fléau. Cette femme et cet homme endormis depuis neuf cent mille ans, on va alors tenter de les réveiller, pour connaître leur histoire, l'histoire de leur civilisation et de sa destruction. Pour comprendre et apprendre. Et l'on va découvrir la merveilleuse et tragique histoire d'une civilisation disparue et celle tout aussi merveilleuse et tragique d'Eléa et de Païkan.

L'esprit scientifique, l'imagination, l'humour, le lyrisme et la qualité d'écriture (à la fois maîtrisée et poétique) de Barjavel font merveille dans la reconstitution de cette double épopée : celle des hommes d'il y a neuf cent mille ans racontée aux hommes du XXIe siècle, qui vivent aussi la leur. Et comme dans tous les bons romans de science-fiction, les nombreuses extrapolations techniques n'ont d'autre rôle que de dresser un décor, de créer un climat. L'essentiel, c'est la peinture d'une humanité, et c'est le rapport entre cette humanité et la nôtre. Par cette confrontation le romancier dépeint l'homme d'aujourd'hui (ses limites, ses erreurs et ses rêves) et son récit a des résonances politiques, scientifiques et morales très actuelles. "Nous savons au moins déjà une chose, c'est que l'homme est merveilleux, et que les hommes sont pitoyables".

Barjavel distille dans son récit son message humaniste : il avertit du danger que le progrès scientifique et technique fait peser sur l'humanité, il délivre un message pacifiste porté par la jeunesse et surtout, il en appelle à l'amour, le seul sentiment capable de transcender notre destinée. Car ce livre est aussi une étonnante et fabuleuse histoire d'amour, celle d'Eléa et de Païkan, que Barjavel inscrit au panthéon des amants légendaires.

J'ai lu ce livre pour la première fois à mon adolescence. J'en ai gardé le souvenir ébloui d'une intensité douloureuse. J'ai conservé ce livre précieusement, presque pieusement, sans oser le relire, de peur d'être déçue, de peur de ne pas y retrouver les mêmes émotions qui m'avaient tant bouleversées, de peur de briser ce si délicieux souvenir. Et puis hier, au bout de quinze ans, je me suis décidée, j'ai pris mon livre... et ne l'ai plus lâché ! Et bien que je connaisse le final, j'ai été prise de frissons, encore une fois. J'ai lu et reconnu les signes annonciateurs de la tragédie, j'ai vu l'intrigue se mettre en place, et je m'y suis laissée prendre... Alors oui, ce roman a ses naïvetés, mais quand vous l'avez entre les mains, tout le reste disparaît : on s'accroche, on vibre, on espère et désespère, et on finit touché et ému, une larme au fond des yeux.

  

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René Barjavel, La nuit des temps, éd. Presses de la Cité, coll. Pocket, 2006 (1968), 393 pages, 6,30 €.

04/09/2007

L'autobus - Eugenia Almeida (2005)

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c19e64e034bd4931d89ac933049ee413.gifIl existe des livres, comme celui-ci, qui n'ont l'air de rien : une centaine de pages, une couverture quelconque, un titre anodin... Mais c'est souvent quand on ne s'y attend pas que l'on se retrouve estomaqué. Et justement L'autobus est l'un de ces petits romans dont l'aspect inoffensif dissimule en réalité une force tragique et une puissance critique insoupçonnées.

L'intrigue paraît banale : dans une petite ville perdue en Argentine, l'autobus passe tous les soirs, mais depuis trois soirs, il ne s'arrête plus. Et cela fait trois soirs que l'avocat Ponce accompagne sa sœur pour prendre cet autobus qui passe devant eux sans s'arrêter. Trois soirs qu'un couple attend lui aussi cet autobus qui ne s'arrête pas. Alors que Ponce ramène sa sœur chez lui dans l'attente du prochain bus, le couple, excédé, décide de partir à pieds le long de la voie ferrée. Car le train non plus ne passe plus, la barrière du passage à niveau est baissée et un wagon posé sur la voie empêche toute circulation. Le village s'interroge, le soupçon et la confusion s'installent. La radio parle d'une jeune fille en fuite, d'un couple de subversifs, d'exercices militaires, d'une fusillade à la nuit tombée... Et l'autobus s'arrête de nouveau alors que personne ne l'attend plus.

Une écriture minimaliste, des dialogues elliptiques, un récit théâtralisé, un nombre réduit de personnages et un périmètre d'action très restreint : ce roman étrange se caractérise par sa sobriété et son détachement sous lesquelles couve une atmosphère de terreur larvée. Et même si ce roman reste un peu "en deçà", il révèle sous son apparence anecdotique une vraie force critique en illustrant la contamination rampante des actes et des esprits par la perversité du pouvoir dictatorial.

  

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Eugenia Almeida, L'autobus (El colectivo), traduit de l'espagnol (Argentine) par René Solis, éd. Métailié, 2007 (2005), 124 pages, 15 €.

Merci à Cuné de m'avoir offert ce livre à l'occasion du swap !

Voici aussi les avis de Flo et YueYin.