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22/04/2010

Gatsby le Magnifique – Francis Scott Fitzgerald [1925]

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Gatsby le Magnifique.gifDans les années 1920 Nick Carraway, jeune trentenaire courtier en bourse à Manhattan, s'installe à Long Island, seul habitant d'origine modeste dans un quartier de nouveaux riches. Il y retrouve sa cousine Daisy et son mari Tom Buchaman. Il y rencontre aussi son énigmatique voisin, Gatsby, un excentrique, un homme fabuleusement riche qui possède une somptueuse propriété où il organise les fêtes les plus extravagantes où cocktails et jazz enivrent une troupe d'invités iconoclastes. Mais si Gatsby le Magnifique joue ainsi l'éblouissement par de folles dépenses, c'est pour ramener à lui Daisy, mariée à un millionnaire qui, à la différence de Gatsby, n'a pas gagné sa fortune, mais en a hérité.

« A mesure que la Terre se détache à regret du Soleil, l'éclat des lumières s'amplifie. L'orchestre joue des arrangements de légère musique jaune cocktail et le concert des voix monte vers l'aigu. Les rires se font plus francs de minute en minute, jaillissent au moindre jeu de mot avec plus d'abandon. Les groupes changent plus vite, se gonflent au passage de nouveaux arrivants, se désagrègent et se reforment, en une même respiration - et déjà se détachent les téméraires, les femmes sûres d'elles-mêmes, qui louvoient çà et là, entre les îlots les plus stables et les mieux ancrés, y deviennent pour un temps très bref le centre d'une excitation joyeuse, puis, fières de leur triomphe, reprennent leur errance, portées par le courant des voix, des couleurs, des visages, dans une lumière qui change sans cesse. » (p. 60)

« Trente ans - promesse de dix années de solitude, d'une liste d'amis célibataires qui n'ira qu'en s'amincissant, d'une réserve d'énergie qui n'ira qu'en s'appauvrissant, de cheveux qui n'iront qu'en s'éclaircissant. Mais Jordan était à côté de moi. Contrairement à Daisy, elle était assez sage pour ne pas s'encombrer, d'âge en âge, de rêves oubliés. Quand la voiture s'est engagée sur le pont, son visage s'est posé contre mon épaule avec lassitude, et le contrecoup des trente ans s'est apaisé sous la calme pression de sa main. » (p. 167)

Gatsby est un mélo rocambolesque doté d'une intrigue quelque peu artificielle qui pourrait être un mauvais scénario sans l'élégance de la prose de Fitzgerald et l'acuité de sa plume, les multiples significations contenues dans une seule de ses phrases, la dimension et l'intensité des impressions qui se dégagent d'un seul de ses paragraphes, sa faculté à capter et retranscrire en quelques mots la saveur d'une époque, l'atmosphère d'une soirée, le parfum d'une femme, la vacuité d'un sentiment...

Gatsby est aussi un roman d'amour, mais un roman d'amour où l'on ne ressent jamais l'amour, seulement l'argent qui le permet ou qui l'empêche, l'amour de l'argent. Il démontre le pouvoir destructeur de l'argent et le caractère superficiel de ceux qui le possèdent. Car dans ce roman l'argent aveugle le jugement des personnages, les mène à des actes effroyables, les rendant froids, hautains et surtout indifférents aux conséquences de leurs actes.

Gastby est ainsi une satire mordante, une fable amère sur l'opulence et la superficialité de la jeunesse nantie des années 1920, une jeunesse dorée qui vie dans un univers futile et factice, qui cherche à noyer son désespoir né de la Grande Guerre dans le jazz et l'alcool de contrebande, le luxe et les excès, l'illusion des apparences.

Gastby est parfois un livre snob, mais dont le snobisme ironique n'est qu'une échappatoire au désenchantement.

Gatsby est une chronique qui, dans une prose légère et brillante, hésite entre élégance et nonchalance...

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Francis Scott Fitzgerald, Gatsby le Magnifique (The Gret Gatsby), traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jacques Tournier, éd. Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, 2007 (1925), 218 pages, 9,20 €.

17/09/2007

Le Bal – Irène Némirovsky (1930)

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bbbad7dd592a3702e566f0f7307c5dcd.gifDébut du XXe siècle : les Kampf, "nouveaux riches", organisent un bal afin de se lancer dans le monde. Antoinette Kampf, quatorze ans, en révolte adolescente, rêve d'y assister, mais sa mère s'y oppose catégoriquement : «Apprends, ma petite, que je commence seulement à vivre, moi, tu entends, moi, et que je n'ai pas l'intention de m'embarrasser de sitôt d'une fille à marier...» Antoinette saisira une occasion providentielle de vengeance, sans l'avoir préméditée, mais celle-ci sera perfide et cruelle à souhait !

Le Bal est un court récit grinçant et drôle, au style précis et incisif, entre crise familiale et critique sociale. Il conte avec humour et cynisme les affres tragi-comiques de parvenus qui reçoivent pour la première fois des gens qu'ils méprisent et dont ils se savent méprisés : «Pour la première réception, du monde et encore du monde, le plus de gueules que tu pourras... A la seconde ou à la troisième, seulement, on trie...»

Irène Némirovsky dépeint aussi avec une grande justesse la rivalité mère-fille et l'âpre solitude de l'enfance, son incompréhension, son mépris et son rejet du monde adulte au moment d'y pénétrer : «Mais ils ne voyaient donc pas, aveugles, imbéciles, qu'elle était mille fois plus intelligente, plus précieuse, plus profonde qu'eux tous, ces gens qui osaient l'élever, l'instruire... Des nouveaux riches grossiers, incultes... Ah ! comme elle avait rit d'eux toute la soirée, et ils n'avaient rien vu, naturellement... elle pouvait pleurer ou rire sous leurs yeux, ils ne daignaient rien voir... une enfant de quatorze ans, une gamine, c'est quelque chose de méprisable et de bas comme un chien...»

Je me suis régalée du style vif et élégant d'Irène Némirovsky, et le seul reproche que je peux formuler contre son roman, c'est qu'il est bien trop court ! Je vais donc me précipiter sur Suite française...

  

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Irène Némirovsky, Le Bal, éd. Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, 2002 (1930), 120 pages, 6,50 €.

Les avis de Musky et de Cuné.