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13/11/2008

Le chemin des sortilèges – Nathalie Rheims (2008)

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Le chemin des sortilèges.gifUn jour l'homme qui l'avait accompagné vers l'âge adulte, celui qui fut l'amant de sa mère et son père symbolique, est parti. Il a abandonné sa femme, ses enfants et sa carrière de psychanalyste, s'est retiré dans la solitude d'une maison de campagne et a cessé tout contact avec qui que ce soit. Dix ans de silence plus tard, elle le rejoint dans son refuge. Commence alors un huis clos étrange, un face à face de six jours pendant lequel, tous les soirs, elle trouve à son chevet un conte qui l'entraîne dans un long rêve éveillé fantasmagorique. Elle entreprend ainsi une quête des origines, un parcours initiatique dont les étapes sont les contes et légendes de l'enfance dans lesquels le réel se fond et qui vont permettre à la jeune femme de se redécouvrir. Des contes à l'innocence perverse, qui dénoncent les vérités trop tristes : que les hommes les plus forts peuvent fuir, que les femmes amoureuses peuvent abandonner leurs enfants, que les enfants abandonnés sont prêts à n'importe quoi pour un peu d'amour, que nos morts restent longtemps présents...

Ce roman de Nathalie Rheims est un récit intimiste où l'on sent poindre une faille personnelle, la nécessité de conjurer le silence, l'absence, l'abandon et la mort. Il s'en dégage une atmosphère fantasmagorique, proche du fantastique et du surnaturel, entre songe et réalité. Nathalie Reims joue des ambiguïtés et excelle à créer un univers onirique, une atmosphère aux frontières du réel et du rêve. Mais elle semble parfois elle-même s'y égarer et ne plus savoir comment s'en extirper. En outre sa psychologie des contes à peine revisitée reste très superficielle, simple paraphrase de ce que la narratrice lit.

Un récit fluide et léger, mais inabouti.

 

BlueGrey

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Nathalie Rheims, Le chemin des sortilèges, éd. Léo Scheer, 179 pages, 14 €.

Les avis de Karine :), crapouillaud, sylire, Malice et Stéphanie.

Merci à Chez les filles et aux Editions Léo Scheer de m'avoir envoyé ce livre.

02/11/2008

Sans sang – Alessandro Baricco (2002)

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« Tito déplaça une panière de fruits. Il reconnut sur le plancher la forme d'une trappe. Il tapa un grand coup par terre avec sa botte, pour entendre quel bruit ça faisait. Il déplaça deux autres panières. C'était une petite trappe, découpée avec soin. Tito leva les yeux. Par une petite fenêtre on voyait, dehors, l'obscurité. Il ne s'était même pas rendu compte qu'il faisait déjà nuit. Il se dit qu'il était temps d'en partir, de cet endroit. Puis il s'agenouilla sur le sol, et souleva le volet de la trappe. Il y avait une petite fille, là au fond, pelotonnée sur le côté, les mains cachées entre ses cuisses, la tête légèrement pliée en avant, vers les genoux. Elle avait les yeux ouverts.
Tito pointa son pistolet sur la petite fille. »

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« - Bonsoir, dit-elle.
L'homme leva les yeux de son journal. Il s'apprêtait à dire quelque chose, mais quand il vit le visage de la femme il s'arrêta, et n'alla pas plus loin. Il resta ainsi, à regarder ce visage. »

Cachée dans un trou, sous le plancher d'une ferme, la petite Nina assiste à l'assassinat sanglant de son père et de son frère. Pourquoi ont-ils été massacrés ? Il est vaguement question de règlement de comptes, aux lendemains d'une guerre. Mais l'on ne saura jamais laquelle, ni les raisons exactes du carnage. Un demi-siècle plus tard, Nina retrouve l'un des assassins, l'invite au café, se lamente sur la cruauté du destin, et le conduit dans une chambre d'hôtel... Et on s'arrête là, en se demandant où l'auteur à voulu en venir. On s'interroge, en quête d'explication et de sens : s'agit-il d'une fable, d'une parabole ? On le suppose. Mais on n'en trouve pas la clef : la vengeance ? L'engrenage de la violence ? La dépendance à l'horreur ?

« Le pays allait de l'avant, bien loin de la guerre, à une vitesse incroyable, en oubliant tout. Mais il y avait tout un monde qui n'en était jamais sorti, de la guerre, et qui dans ce pays heureux n'arrivait pas à redémarrer. Moi j'étais comme ça. »

Baricco habille de points de suspension une histoire rachitique. Rien de saisissant, rien de bouleversant, rien de franchement mauvais ou raté non plus. Entre-deux. Une belle écriture par moment, quelques très jolis passages, mais au final, cela reste confus et vain.

 

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Alessandro Baricco, Sans sang (Senza sangue), traduit de l'italien par Françoise Brun, éd. Albin Michel, 2003 (2002), 112 pages, 12 €.

L'avis de Lucile.

Du même auteur : Océan mer et Soie

25/10/2008

La Plume empoisonnée – Agatha Christie (1942)

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La Plume empoisonnée.gifGravement blessé dans le crash de son avion, Jerry Burton, le narrateur, part séjourner quelques mois avec sa sœur Joanna à Lymstock, village de la campagne anglaise, pour une convalescence au calme. Sitôt installés ils font la connaissance du voisinage, une kyrielle de personnages pittoresques, et sont la cible de lettres anonymes insultantes. Car dans l'habituellement paisible village sévit un corbeau malfaisant. Le notaire, le médecin, la femme du pasteur... tout le monde a droit a son courrier aux accusations aussi invraisemblables qu'odieuses. Et petit à petit le doute s'insinue dans les esprits de la petite communauté villageoise : il n'y a pas de fumée sans feu... Jusqu'au jour où l'épouse du notaire se suicide après réception d'une de ses lettres. La femme du pasteur décide alors de faire appel à Miss Marple afin d'élucider cette affaire.

Tout en ne négligeant pas le côté criminel de l'affaire, Agatha Christie semble avoir voulu privilégier une sorte d'étude sociologique ou de peinture de mœurs, mâtinée de comédie sentimentale.

En effet l'intrigue sentimentale occupe dans ce roman une place assez inaccoutumée par rapport au reste de l'œuvre d'Agatha Christie. Ce sont même en fait deux intrigues amoureuses croisées qu'y conduit Agatha Christie : celle de Joanna, la londonienne un peu futile qui ne résiste pas au plaisir de tester son pouvoir de séduction, et celle de Jerry qui, intrigué par la personnalité fantasque de Megan, jeune femme mal-aimée dans sa famille, va jouer les Pygmalion. Ces idylles parallèles du frère et de la sœur donnent un aspect "comédie hollywoodienne" assez inhabituel et amusant.

Quant à l'intrigue policière, elle y est elle aussi conduite de manière très inhabituelle, en deux temps asymétriques. Dans un premier temps, le récit se présente comme la chronique d'une petite ville frappée par une épidémie de lettres anonymes malveillantes. Le tout conté par un témoin étranger (et néanmoins parti prenante) au regard extérieur gentiment railleur. Dans le second temps, très bref, Miss Marple résout le mystère en un habile final en double détente. A noter que Miss Marple n'intervient que très tardivement dans ce roman, Agatha Christie semblant prendre un certain plaisir à développer son "étude de milieu" de la première partie.

 

BlueGrey

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Agatha Christie, La Plume empoisonnée (The Moving Finger), traduit de l’anglais par Elise Champon, éd. du Masque, coll. Masque Christie, 1994 (1942), 222 pages, 5,20 €.

Du même auteur : Cinq petits cochons

22/10/2008

Le club Jane Austen – Karen Joy Fowler (2004)

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Le club Jane Austen.gifSylvia, sa fille Allegra, Prudie, Bernadette, Jocelyn et Grigg, seul homme du groupe, forment Le club Jane Austen. Ils se retrouvent chaque mois chez l'un ou l'autre pour parler d'un des ouvrages de la romancière. Mais nul besoin de connaître l'œuvre de dame Austen pour comprendre ce qui se joue entre les protagonistes qui, au fil des pages, se racontent. Car les réunions du club ne sont que prétexte à la découverte progressive des membres qui le composent. Naissance de l'amitié entre Sylvia et Jocelyn ; désarroi de Sylvia face au départ de son mari après trente-deux ans de mariage et trois enfants ; solitude de Jocelyn l'entremetteuse qui a pour seule compagnie ses chiens de concours ; enfance agitée de Bernadette la multi-divorcée ; fantasmes de Prudie la sage pour un de ses élèves ; goût du risque pour la belle Allegra aux amours saphiques ; passion de Grigg pour la science-fiction ; rencontres, séparations, deuils, amours... chaque chapitre rappelle que la vie est l'essence des romans.

Tantôt fine observatrice des relations humaine, tantôt gentiment critique de la middle-class californienne, tantôt drôle ou piquante, d'autres fois plus superficielle, l'écriture légère de Fowler livre un ouvrage agréable et distrayant, une chronique sur l'air du temps.

« "Lequel lirons-nous ensuite ? demanda Bernadette. Orgueil et préjugés est mon préféré.
- Allons-y, alors, dit Sylvia.
- Tu es certaine ? demanda Jocelyn.
- Certaine. Il est temps. De toute manière, dans Persuasion il y a la mère morte. Je ne veux pas imposer ce sujet à Prudie en ce moment. La mère dans Orgueil et préjugés, d'un autre côté...
- Ne révélez rien ! fit Grigg, je ne l'ai pas encore lu. »
Grigg n'avait pas encore lu Orgueil et préjugés.
Grigg avait lu Les mystères d'Udolphe et Dieu sait combien d'ouvrages de science-fiction - il y avait des livres partout dans la maison - mais il n'avait jamais trouvé le temps ou l'envie de lire Orgueil et préjugés. Nous sommes restées sans voix. »

« Lorsque j'étais en route pour l'hôpital, lui dit Sylvia, j'ai pensé que si Allegra allait bien je serais la femme la plus heureuse du monde. Mais aujourd'hui l'évier est bouché et il y a des cafards dans le garage et je n'ai pas le temps de m'en occuper. Le journal est rempli de misère et de guerres. Déjà il faut que je me rappelle d'être heureuse. Et tu sais, si ça s'était passé autrement, si quelque chose était arrivé à Allegra, je n'aurais pas eu besoin de me rappeler d'être malheureuse. J'aurais été malheureuse pour le restant de mes jours. Pourquoi donc le malheur est-il tellement plus puissant que le bonheur ?
- Un seul élément gâche tout un groupe, répondit Jocelyn. Une seule déception gâche toute une journée.
- Une seule infidélité efface des semaines de fidélité.
- Il faut dix semaines pour retrouver sa silhouette et dix jours pour la perdre.
- C'est ce que je veux dire, fit Sylvia. On n'a aucune chance. »

 

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Karen Joy Fowler, Le club Jane Austen (The Jane Austen book club), traduit de l'américain par Sylvie Doizelet, éd. Gallimard, coll. folio, 2007 (2004), 374 pages, 7,40 €.

Les avis de Cuné, Karine :), Chimère et du Biblioblog.

19/10/2008

Le chasseur Zéro – Pascale Roze (1996)

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Le chasseur Zéro.gifLaura grandit en solitaire dans un huis clos étouffant entre une mère dépressive et alcoolique, une grand-mère autoritaire et un grand-père distant. Son père ? Mort en 1945, alors que Laura n'avait que trois mois. Laura finit par découvrir qu'il était officier de marine et a été tué à Okinawa lorsque le cuirassé sur lequel il servait a été coulé par un kamikaze. Elle est alors hantée par le «chasseur Zéro», le kamikaze dont elle entend en permanence dans ses oreilles le vrombissement de l'avion.

Le chasseur Zéro, prix Goncourt 1996, est un roman court, au style tendu, à l'écriture sèche et rigoureuse : 163 pages serrées à l'atmosphère angoissante. C'est l'histoire d'une obsession qui tourne à l'hallucination auditive. Car Laura, en découvrant le secret de la mort de son père, va développer une relation hallucinatoire, obsessionnelle et passionnelle avec le kamikaze. Or, si j'aurais pu comprendre une quête du père (mais du père, il n'est quasiment pas question) ou une certaine interrogation-fascination pour le kamikaze, je n'ai absolument pas adhéré à la passion amoureuse que Laura éprouve pour lui : malsain, morbide et incompréhensible. Impossible pour moi de m'identifier à Laura, que je ne comprends pas, alors que c'est elle la narratrice. Pascale Roze abuse du "je", présent dans chaque phrase, à chaque ligne. Ce "je" omniprésent sans que je puisse m'y identifier m'a tenu très éloignée du récit, extérieure à l'histoire, que j'ai lu sans plaisir.

 

BlueGrey

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Pascale Roze, Le chasseur Zéro, éd. Albin Michel, 1996, 163 pages, 13 €.