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02/06/2009

La dame noire – Stephen Carter (2007)

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La dame noire.gifJulia et Lemaster Carlyle forment un des couples africains-américains les plus en vue de Nouvelle-Angleterre : ils sont beaux, riches, puissants et familiers de la Maison Blanche, ce qui fascine autant que cela irrite dans ce bastion de la "blanchitude". Un soir, alors qu'ils rentrent d'une réception donnée à la prestigieuse université que Lemaster dirige, ils sont pris dans une tempête de neige et leur voiture quitte la route. Près du lieu de l'accident, ils découvrent un cadavre, celui de l'éminent économiste noir Kellen Zant, ancien amant de Julia.

Ce crime va bouleverser la petite ville universitaire d'Elm Harbor en ravivant les plaies de la question raciale, car ce meurtre semble étrangement lié à celui de Gina Joule, une adolescente blanche prétendument assassinée par un jeune noir il y a 30 ans de cela. Et alors que l'enquête officielle se dirige vers l'hypothèse pas vraiment convaincante du crime crapuleux, Julia s'interroge. Car grâce à d'infimes indices que lui a adressés Kellen, elle découvre qu'avant sa mort il travaillait sur un projet qu'il tenait secret mais qui, d'après lui, pouvait bouleverser le résultat des prochaines élections présidentielles. Alors, un peu malgré elle, guidée par la piste laissée par Kellen, Julia se résout à mener sa propre enquête, tout en veillant sur sa fille Vanessa, inexplicablement obnubilée par la mort de Gina Joule.

Un foisonnement de détails, une foultitude de personnages secondaires, une enquête caracolant de fausses pistes en rebondissements : démêler l'intrigue s'avère long et fastidieux. Elle aurait sans doute mérité d'être resserrée, surtout dans la première moitié du livre, pour gagner en dynamisme. D'autant plus que le personnage de Julia, notre enquêtrice-amatrice, est d'une agaçante indécision et met un temps excessivement long à décrypter les indices laissés par Kellen. Quant au personnage de Lemaster (sur lequel pèsent quelques soupçons), il est exaspérant de suffisance, de froideur et de rigidité.

Toutefois ce polar s'avère prenant, pas tant pour l'enquête elle-même (qui tourne un peu en rond), que pour son description en finesse d'une communauté subtilement raciste, et pour sa dissection passionnante de cette élite noire qui a du mal à trouver sa place et à imposer sa voix dans la société américaine actuelle. Les personnages de Carter, malgré leur position sociale privilégiée, sont en permanence confrontés aux limites que leur couleur de peau leur impose.

Le roman aborde aussi de grands thèmes "moraux" (que font et que sont les individus face à l'ambition, la richesse, le pouvoir, la corruption, la discrimination, et face à l'assassinat de l'un d'entre eux) sans en être "plombant". La principale interrogation de Carter semble être : pourquoi les individus font-ils les choses qu'ils font ? Particulièrement les "mauvaises" choses ? Et comment les justifient-ils ?

La faiblesse humaine est un sujet troublant et fascinant, qui semble préoccuper et captiver Carter, qui nous captive de même.

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Stephen Carter, La dame noire (New England White), traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Bernard Cohen, éd. Robert Laffont, 2009 (2007), 649 pages, 22,50 €.

L'avis de pom'.

Merci à BOB et aux Editions Robert Laffont pour l'envoi de ce livre.

23/02/2009

Brown's requiem – James Ellroy (1981)

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Brown s requiem.gifFritz Brown est un ancien "flic merdique, la honte du service" qui s'est reconverti dans la récupération de voitures impayées. A côté de cette activité, gentiment lucrative, il s'offre pour des raisons fiscales une façade de détective privé. Cette astuce comptable va l'entraîner dans une enquête de trois cent cinquante pages serrées, (où toutefois l'action incessante s'épuise parfois dans une longue poursuite) quand un caddy dingo l'engage pour surveiller sa jolie soeur qui vit en compagnie d'un homme qui pourrait être son père.

Malgré un récit de construction chronologique, Ellroy excelle dans la mise en place d'une narration aussi déstructurée et hallucinée que les errances mentales et affectives de son héros, ce qui égare autant que subjugue le lecteur qui ne sait plus que croire et comment assembler les pièces du puzzle et qui est tenu de bout en bout par l'intrigue ! En savoir plus...

13/01/2009

Crime Song, La ballade de Billy Porter - Jake Arnott (2001)

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Crime song.gifLondres, années 60 : trois policiers sont abattus de sang-froid. Autour de ces meurtres naviguent Billy la petite frappe pris dans l'engrenage de la violence, Frank le flic ambitieux qui vogue en eaux troubles et Tony le dépravé, journaliste à scandales à la dérive. De l'effervescence psychédélique des swinging sixties à la brutalité de la période Thatcher des années 80, on suit l'évolution en chute libre de ces trois personnages sur près de 20 ans. L'auteur nous plonge avec habileté dans un maelstrom nauséabond fait de brumes londoniennes, rues sombres et sinueuses, odeur d'alcool, bistrots mal famés, trafics divers, flics corrompus, petits malfrats et pute troublante.

Un polar de facture classique mais efficace avec, au-delà de l'intrigue policière, en filigrane, l'évocation du malaise d'une société en métamorphose : libération des mœurs, mouvements pacifistes, grèves des mineurs, émeutes, répression policière, corruption... En cette période trouble, il y a quelque chose de pourri au royaume d'Angleterre...

Crime Song est le deuxième volet de la trilogie policière de l'écrivain anglais Jake Arnott après Crime Unlimited et avant True Crime, mais peut se lire indépendamment des deux autres volets.

 

BlueGrey

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Jake Arnott, Crime Song, La ballade de Billy Porter, traduit de l'anglais par Colette Carrière, éd. Passage du Marais, 2003, 308 pages, 21 €.

10/01/2009

Que la nuit demeure – Michèle Lesbre (1999)

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Que la nuit demeure.gifEté 1987 : le couple Carlat vient séjourner dans une maison isolée dans la montagne, maison qu'ils louent à l'étrange Antoine Pellot. Cet homme frustre, qui de fait devient leur inquiétant voisin, semble tourmenté par un passé obscur. Un jour, un "accident" se produit...

1997 : au moment d'archiver le dossier de l'affaire, André Martin, le flic qui en fut chargé, se souvient... Il se souvient surtout d'Anne Carlat, trop jeune pour son mari, trop belle pour passer ses vacances dans un coin pareil, trop triste pour son âge et surtout, trop semblable à Cécile, la fille suicidée d'André...

Ainsi confronté à Anne, sosie de sa fille suicidée, André cherche sa présence avant tout et prolonge les interrogatoires : il veut tout savoir d'elle. Chaque détail, même le plus insignifiant, même déconnecté de l'affaire, le nourrit. Il s'en délecte, s'en repaît, s'en saoule, se complaît dans l'amertume du souvenir de sa fille. Elle, joue le jeu : épouse trompée, elle trouve en lui le confident bienveillant dont elle avait besoin et raconte son quotidien. La déposition d'Anne se transforme en analyse, la simple enquête de routine d'André vire à l'obsession.

Michèle Lesbre a un ton particulier qui met parfaitement en valeur les ambiances et les personnages. Ainsi, alors que l'histoire se situe dans une région de lumière (le Sud), on a sans cesse l'impression qu'il fait gris et poisseux. Michèle Lesbre est économe en mots et use d'une écriture retenue : elle évite les mièvreries stylistiques et tout sensationnalisme. Dans son univers de déambulations mentales, le moindre mot ou geste de ses personnages est à disséquer pour saisir les dérèglements de chacun, ces petites folies qui font les grands drames. A moindre mot, Michèle Lesbre rend la grisaille des existences dans leur banalité et fait ressentir la profonde détresse d'André -père meurtri- et d'Anne -femme bafouée- mais aussi d'Antoine Pellot, second rôle énigmatique très bien campé. Ce roman, pas bavard donc, mais précis, est d'une grande maîtrise dans sa construction. Dommage que sa partie conclusive soit plus brouillonne, un peu décousue et confuse, pataude même. La chute, violente, que l'on pressent et vers laquelle on accompagne André, ne m'a pas convaincue.

 

BlueGrey

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Michèle Lesbre, Que la nuit demeure, éd. Actes Sud, coll. Babel noir, 1999, 182 pages, 7,50 €.

Les avis de Malice et de Lily.

25/10/2008

La Plume empoisonnée – Agatha Christie (1942)

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La Plume empoisonnée.gifGravement blessé dans le crash de son avion, Jerry Burton, le narrateur, part séjourner quelques mois avec sa sœur Joanna à Lymstock, village de la campagne anglaise, pour une convalescence au calme. Sitôt installés ils font la connaissance du voisinage, une kyrielle de personnages pittoresques, et sont la cible de lettres anonymes insultantes. Car dans l'habituellement paisible village sévit un corbeau malfaisant. Le notaire, le médecin, la femme du pasteur... tout le monde a droit a son courrier aux accusations aussi invraisemblables qu'odieuses. Et petit à petit le doute s'insinue dans les esprits de la petite communauté villageoise : il n'y a pas de fumée sans feu... Jusqu'au jour où l'épouse du notaire se suicide après réception d'une de ses lettres. La femme du pasteur décide alors de faire appel à Miss Marple afin d'élucider cette affaire.

Tout en ne négligeant pas le côté criminel de l'affaire, Agatha Christie semble avoir voulu privilégier une sorte d'étude sociologique ou de peinture de mœurs, mâtinée de comédie sentimentale.

En effet l'intrigue sentimentale occupe dans ce roman une place assez inaccoutumée par rapport au reste de l'œuvre d'Agatha Christie. Ce sont même en fait deux intrigues amoureuses croisées qu'y conduit Agatha Christie : celle de Joanna, la londonienne un peu futile qui ne résiste pas au plaisir de tester son pouvoir de séduction, et celle de Jerry qui, intrigué par la personnalité fantasque de Megan, jeune femme mal-aimée dans sa famille, va jouer les Pygmalion. Ces idylles parallèles du frère et de la sœur donnent un aspect "comédie hollywoodienne" assez inhabituel et amusant.

Quant à l'intrigue policière, elle y est elle aussi conduite de manière très inhabituelle, en deux temps asymétriques. Dans un premier temps, le récit se présente comme la chronique d'une petite ville frappée par une épidémie de lettres anonymes malveillantes. Le tout conté par un témoin étranger (et néanmoins parti prenante) au regard extérieur gentiment railleur. Dans le second temps, très bref, Miss Marple résout le mystère en un habile final en double détente. A noter que Miss Marple n'intervient que très tardivement dans ce roman, Agatha Christie semblant prendre un certain plaisir à développer son "étude de milieu" de la première partie.

 

BlueGrey

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Agatha Christie, La Plume empoisonnée (The Moving Finger), traduit de l’anglais par Elise Champon, éd. du Masque, coll. Masque Christie, 1994 (1942), 222 pages, 5,20 €.

Du même auteur : Cinq petits cochons