10/01/2009
Que la nuit demeure – Michèle Lesbre (1999)
Eté 1987 : le couple Carlat vient séjourner dans une maison isolée dans la montagne, maison qu'ils louent à l'étrange Antoine Pellot. Cet homme frustre, qui de fait devient leur inquiétant voisin, semble tourmenté par un passé obscur. Un jour, un "accident" se produit...
1997 : au moment d'archiver le dossier de l'affaire, André Martin, le flic qui en fut chargé, se souvient... Il se souvient surtout d'Anne Carlat, trop jeune pour son mari, trop belle pour passer ses vacances dans un coin pareil, trop triste pour son âge et surtout, trop semblable à Cécile, la fille suicidée d'André...
Ainsi confronté à Anne, sosie de sa fille suicidée, André cherche sa présence avant tout et prolonge les interrogatoires : il veut tout savoir d'elle. Chaque détail, même le plus insignifiant, même déconnecté de l'affaire, le nourrit. Il s'en délecte, s'en repaît, s'en saoule, se complaît dans l'amertume du souvenir de sa fille. Elle, joue le jeu : épouse trompée, elle trouve en lui le confident bienveillant dont elle avait besoin et raconte son quotidien. La déposition d'Anne se transforme en analyse, la simple enquête de routine d'André vire à l'obsession.
Michèle Lesbre a un ton particulier qui met parfaitement en valeur les ambiances et les personnages. Ainsi, alors que l'histoire se situe dans une région de lumière (le Sud), on a sans cesse l'impression qu'il fait gris et poisseux. Michèle Lesbre est économe en mots et use d'une écriture retenue : elle évite les mièvreries stylistiques et tout sensationnalisme. Dans son univers de déambulations mentales, le moindre mot ou geste de ses personnages est à disséquer pour saisir les dérèglements de chacun, ces petites folies qui font les grands drames. A moindre mot, Michèle Lesbre rend la grisaille des existences dans leur banalité et fait ressentir la profonde détresse d'André -père meurtri- et d'Anne -femme bafouée- mais aussi d'Antoine Pellot, second rôle énigmatique très bien campé. Ce roman, pas bavard donc, mais précis, est d'une grande maîtrise dans sa construction. Dommage que sa partie conclusive soit plus brouillonne, un peu décousue et confuse, pataude même. La chute, violente, que l'on pressent et vers laquelle on accompagne André, ne m'a pas convaincue.
BlueGrey
______________________________
Michèle Lesbre, Que la nuit demeure, éd. Actes Sud, coll. Babel noir, 1999, 182 pages, 7,50 €.
14:18 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : littérature, livre, roman, polar
Commentaires
Dommage que ton avis soit mitigé... le résumé me semblait bien intéressant... we'll see donc.
Écrit par : Karine :) | 10/01/2009
Cela fait pas mal de temps que j'aimerai découvrir l'auteure. Et même si ta critique est mitigée, je retiens aussi ce que tu en dis ici :"Michèle Lesbre est économe en mots et use d'une écriture retenue : elle évite les mièvreries stylistiques et tout sensationnalisme." Et cela me donne encore plus envie de la découvrir ;-)
Écrit par : sentinelle | 10/01/2009
@ Karine :) & sentinelle : j'ai quand même plutôt aimé, c'est juste la partie conclusive qui m'a moins convaincue...
Écrit par : BlueGrey | 13/01/2009
Dommage pour la fin car le début de ta critique était plus que tentant :-)
Écrit par : yueyin | 19/01/2009
Dommage que ton avis soit mitigé... le résumé me semblait bien intéressant... we'll see donc.
Écrit par : Anna | 16/11/2009
Les commentaires sont fermés.