07/09/2008
La perle - John Steinbeck (1947)
«Jouant de sa lame comme d'un levier, il le fit céder et le coquillage s'ouvrit. Les lèvres de chair se crispèrent puis se détendirent. Kino souleva le repli et la perle était là. Elle accrochait la lumière, la purifiait et la renvoyait dans une incandescence argentée. Elle était aussi grosse qu'un œuf de mouette. C'était la plus grosse perle du monde.»
C'est l'histoire d'une grosse perle, comment elle fut trouvée, puis perdue à nouveau. C'est l'histoire de Kino, le pêcheur, de sa femme Juana et de leur bébé Coyotito. C'est la courte fable d'un pauvre pêcheur d'origine indienne qui pêche, en Californie, la plus grosse perle du monde. Il espère qu'elle lui apportera tout ce dont il a toujours rêvé, le meilleur pour sa femme et son fils, la reconnaissance sociale, et le respect. Mais cette découverte éveille les convoitises des voisins et déchaîne autour de lui les forces du mal...
Le thème et le message de l'oeuvre sont très simples : "l'argent ne fait pas le bonheur". Mais au-delà de cette simplicité, le style de Steinbeck métamorphose le conte en une parabole tragique jugeant de la nature humaine, de la jalousie et de la corruption. Steinbeck caractérise remarquablement les comportements humains, dans des passages courts mais acérés. Ses descriptions des vices et des vertus des hommes sont d'une justesse terrible et implacable. Toute l'analyse de l'auteur est distillée grâce à un style fluide. L'intrigue est menée comme dans un roman policier, les événements se succèdent afin de garder le lecteur toujours en émoi, jusqu'au dénouement tragique.
Un texte agréable pour le style Steinbeck mais dur par l'histoire très noire et jusqu'au bout sans éclaircie.
BlueGrey
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John Steinbeck, La perle (The Pearl), éd. Gallimard, coll. folio, 1973 (1947), 121 pages, 5,30 €.
20:15 | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : littérature, roman, livre, perle, mer, pêcheur
04/09/2008
Les Conspirateurs – Shan Sa (2005)
A Paris, Jonathan Julian, bel informaticien américain, aménage dans le même immeuble que la chinoise Ayamei, ancien leader des émeutes de Tianan men réfugiée en France et étrangement liée à Philippe Matelot, politicien français véreux. Ces trois personnages vont se croiser, se séduire, se mentir, se tromper, se manipuler, se traquer, chacun oeuvrant en secret pour son gouvernement, car tous trois sont espions.
Pour construire son intrigue, l'auteur s'est uniquement concentré sur les tensions relationnelles et émotionnelles entre les personnages qui se livrent à une guerre psychologique. A chaque chapitre, le narrateur change et le lecteur découvre ainsi ce que chacun des personnages sait ou devine des autres, celui que l'on pensait manipulé manipulant tout autant. Les trois espions jouent ainsi à qui est qui en une intrigue en poupées russes où les enjeux politiques mondiaux, la guerre économique entre Etats et les rivalités entre services de contre-espionnages ne servent finalement que de décors à un banal chassé-croisé amoureux. Car sans toutefois oser franchement le vaudeville, ce roman de Shan Sa s'apparente plus à un marivaudage (avec pour épicentre le grand classique du triangle amoureux) qu'à un roman d'espionnage. Et même dans ce registre, nous sommes loin de la beauté poétique du très élégant et sensible roman La joueuse de Go. Les personnages sont caricaturaux, les dialogues sont lourds et affligeants de platitude (saupoudrés par moment d'anglais et chinois en VO, artifice totalement superflu) et les situations manquent de crédibilité. La structure narrative et le développement du récit en un dévoilement progressif des personnalités donne un certain intérêt à l'intrigue, sans toutefois rattraper la désespérante pauvreté et superficialité de l'ensemble, bien fadasse.
BlueGrey
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Shan Sa, Les Conspirateurs, éd. LGF, coll. Le Livre de Poche, 2007 (2005), 217 pages, 6 €.
11:26 | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : littérature, livre, roman, espionnage
01/09/2008
La duchesse de Bloomsbury Street – Helene Hanff (1973)
Après vingt ans de correspondance avec le personnel d'une librairie londonienne spécialisée en livres rares, Helene Hannf la new-yorkaise découvre enfin Londres en juin et juillet 1971. Malheureusement l'ami libraire, Frank Doel, est décédé sans qu'elle ait pu le rencontrer. Mais se femme, sa fille et une foule de personnages hauts en couleur l'accueillent lors de son séjour, ses premières vacances à l'âge de 54 ans. Tour à tour bougonne et enjouée, l'excentrique Helene nous fait partager son voyage, ses rencontres, ses impressions, raconte sa plongée dans un univers mondain qui n'est pas le sien, croque Londres et les londoniens et émaille sont récit de points de vues savoureux (sur le bus, la prostitution, la famille royale, les fêtes nationales, la recette du gin-martini...). Et surtout nous la suivons avec tendresse et émotion sur les traces de ses héros de toujours : dramaturges, poètes, philosophes, de préférence élisabéthains.
Ce récit est certes moins alerte et touchant que sa correspondance, mais pour qui a aimé 84, Charing Cross Road, retrouver Helene fidèle à elle-même (hypocondriaque, impécunieuse et iconoclaste au grand cœur) et partager sa découverte du Londres littéraire est un plaisir !
BlueGrey
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Helene Hanff, La duchesse de Bloomsbury Street (The duchess of Blommsbury Street), traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jean-Noël Liaut, éd. Payot, 2002 (1973), 189 pages, 12,50 €.
L'avis de YueYin.
Du même auteur : 84, Charing Cross Road
09:13 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : littérature, livre, autobiographie, Londres