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18/09/2009

Uglies (Uglies, tome 1) – Scott Westerfeld (2005)

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Uglies.gifDes mots simples, des phrases courtes : l'écriture de Westerfeld ne s'embarrasse pas de fioritures. Il vise l'efficacité directe au service de la narration. Mais l'aventure n'exclut pas la réflexion, et ce roman jeunesse d'anticipation aborde de manière ludique des sujets de société et réussit, très agréablement, une belle critique d'une société qui place la beauté avant le libre-arbitre.

Dans cette société, les enfants sont élevés dans l'attente impatiente du jour de leurs 16 ans, jour où ils subissent l'opération chirurgicale qui leur permet de quitter le monde des "Uglies" pour intégrer la caste des "Pretties". L'opération leur permet ainsi de devenir des êtres nouveaux correspondant aux canons en vigueur de la "beauté parfaite" (laquelle est donc toujours presque identique). Cette opération qui les rend beaux est le rite de passage ultime, symbole d'une nouvelle intégration à la société de perfection. Ainsi après l'opération ils quittent leurs dortoirs pour entamer, de l'autre côté de la rivière, une vie de fête et d'insouciance qui les fait trépigner d'envie.

Tally attend ses 16 ans avec la même impatience que les autres, jusqu'à ce qu’elle rencontre Shay, jeune fille de son âge, qui lui révèle l'existence d'un mystérieux groupe de rebelles qui refusent l'opération et vivent en marge de la société. Et Shay choisit de rejoindre les rebelles avant d'avoir été opérée. Les autorités contraignent alors Tally à partir en quête de Shay et des rebelles, sous peine de se voir refuser elle-même l'opération. Mais ce qu'elle découvre alors ébranle ses convictions et lui ouvre de nouvelles perspectives...

Uglies parle bien sûr en premier lieu de l'adolescence et de ses bouleversements, tant physiques qu'émotionnels, mais, bien que balisé pour des lecteurs adolescents (entre aventure et mystères, rébellion et doutes, amitié et relations amoureuses), le récit est aussi habillement dosé entre action et réflexion. Il parle du diktat de la beauté, d'image de soi, de l'impact du regard des autres, de conformité, d'individualité, de quête identitaire, de choix, de responsabilité et de liberté. Il traite aussi de questions sociétales actuelles, telles l'écologie, la surconsommation, la techno-surveillance, les dangers de l'ultraprotectionnisme et ses risques de dérives vers le totalitarisme. Sur le mode de la dystopie crédible, où l'univers fantastique est suffisamment approfondi pour dépasser son rôle de toile de fond, le récit offre une écriture militante et critique qui toutefois évite l'écueil moralisateur.

Voici donc un roman jeunesse de science-fiction aussi riche en thèmes qu'en aventures, intelligent et captivant.

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Scott Westerfeld, Uglies, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Guillaume Fournier, éd. Pocket Jeunesse, 2007 (2005), 432 pages, 13,50 €.

17/11/2008

Fahrenheit 451 – Ray Bradbury (1953)

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Fahrenheit 451.gifFahrenheit 451 est un classique de la science fiction, le genre de roman dont tout le monde a entendu parler mais que peu ont lu. D'autant que son adaptation cinématographique réalisé par Truffaut en 1966 est elle aussi devenue un classique. Moi-même je ne l'ai pas lu, mais vu au lycée et certaines de ses scènes sont à jamais gravées dans ma mémoire : celle de l'incendie de la maison de la vieille femme qui choisit de s'immoler avec ses livres et celle des "hommes-livres" psalmodiant à l'infini leur "contenu" afin qu'il ne soit pas perdu. Notre thématique "retour aux sources" du dernier RDV du Club Lire & délires était donc pour moi l'occasion idéale pour enfin me plonger dans ce livre fondateur.

451 degrés Fahrenheit, c'est la température à laquelle le papier s'enflamme et se consume. Dans une société totalitaire future indéterminée, c'est aussi le sigle des pompiers dont la fonction est, non plus d'éteindre, mais d'allumer le feu. Il s'agit en effet de bruler les livres, source de questionnement et de réflexion, ferment d'individualisme, au nom du bien commun et du caractère subversif de toute démarche créatrice. Montag, pompier d'élite, allume gaiement ces autodafés jusqu'au jour où une jeune fille au regard vif lui pose la question insidieuse : « Vous arrive-t-il de lire les livres que vous brûlez ? ». Montag se met alors à douter, à subtiliser quelques livres, à remettre en question les principes acquis, à rêver d'un monde différent, qui ne bannirait pas la littérature et l'imaginaire au profit d'un bonheur immédiatement consommable, et sa révolte croît contre une société totalement dépersonnalisée.

Ainsi Fahrenheit 451, selon une démarche classique du récit de science-fiction, projette dans le futur, en la radicalisant de façon à lui donner valeur de mise en garde, une situation contemporaine particulière et inquiétante. En effet le livre a été publié aux Etats-Unis en 1953, l'année où culmine la psychose anticommuniste portée par le maccarthysme, période de réduction de la liberté d'expression, période limitant les droits civiques sous le motif de défendre la sécurité nationale. Par son ouvrage, Ray Bradbury pousse un cri d'alarme sur ce qui pourrait advenir. Il écrit Fahrenheit 451 précisément pour que l'univers terrifiant qu'il y imagine ne devienne jamais réalité.

Est-ce à dire que Fahrenheit 451, parce que sa vision de l'avenir n'a pas été confirmée par l'Histoire, est aujourd'hui dépassé, totalement obsolète ? Bien évidemment non, car son propos reste éminemment pertinent de nos jours : il y est question de guerre larvée entre grandes puissances, de course à l'armement, de danger du nucléaire, de la coupure de l'homme d'avec la nature, de mégalopoles anonymes et déshumanisées, de déliquescence du lien social, de société de consommation et de divertissement, d'uniformisation de la pensée et de conformisme. Il y est aussi et surtout question de l'impérialisme des médias, du grand décervelage auquel procède la publicité, les jeux, les feuilletons et autres niaiseries télévisuelles abrutissantes. Bradbury souligne « il y a plus d'une façon de brûler un livre », l'une d'elle, la plus insidieuse, est de rendre les gens incapables de lire par inculture, désintérêt pour la littérature, paresse mentale ou simple désinformation.

Alors, amis, résistons : lisons !

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Ray Bradbury, Fahrenheit 451, traduit de l'américain par Henri Robillot, éd. Gallimard, coll. folio SF, 2000 (1953), 213 pages, 5€.

Les avis d'Allie et brm&mam.

Thématique : retour aux sources
Chez les copines : ALaure, Anjelica, Choupynette, EtoileDesNeiges, Erzébeth (notre nouvelle recrue !), YueYin et Gaël (Ouaip ! Gaël aussi, c'est une copine !).