05/06/2009
L'amour est à la lettre A – Paola Calvetti (2009)
Emma, cinquantenaire divorcée et milanaise romantique, fatiguée de sa vie trépidante d'interprète, hérite d'une papeterie de quartier qu'elle transforme en une librairie exclusivement dédiée aux romans d'amour. Un jour, un billet glissé dans un volume, un numéro de téléphone et un prénom : Federico. Federico, son amour de jeunesse... Elle l'appelle, il répond, ils se voient, et malgré les trente ans de séparation, tout paraît simple entre eux. Évident. Si ce n'est que Federico vit à présent à New York, où il est architecte, marié et père d'une adolescente. S'ensuit une relation épistolaire d'un côté à l'autre de l'Atlantique... Et nous voici embarqués dans un roman... d'amoûûûr !
Hélas ! Cette relation à distance par lettres interposées sonne indubitablement faux. En effet certaines lettres de Federico s'apparentent plus à des cours magistraux d'architecture qu'à des missives d'amoureux. Et dans celles d'Emma, le recours systématique aux références littéraires est parfois bien maladroit. De plus, après leur première escapade à Belle-Ile-en-Mer, les lettres deviennent répétitives, l'histoire stagne, s'essouffle, jusqu'au revirement final, tout de même attendrissant.
Toutefois, entre les missives échangées, se glissent des parties narratives : les monologues intérieurs d'Emma qui raconte son métier, ses amis, son fils et surtout, sa librairie ! Les scènes de vie dans la librairie (ses employés, ses fidèles lecteurs, ses voisins, et tous les micro-événements qui occupent une journée) sont sans contexte le sujet le plus attachant de ce roman. Car la librairie d'Emma n'est pas une librairie comme les autres, sa librairie, c'est bien plus qu'une librairie ! C'est un cocon, un lieu intimiste, chaleureux, douillet, où on peut prendre son temps sans être harcelé par un vendeur car la personne qui entre n'est pas considérée comme un "client" mais comme un "lecteur". Un lieu privilégié où l'on peut se pelotonner dans un vieux fauteuil pour déguster quelques pages et un thé... Et puis, quel bonheur de fureter dans ses rayons aux noms évocateurs : « Brèves amours » pour le rayon consacré aux nouvelles, « Così fan tutti » pour les livres érotiques, « Amours du jour » pour les nouveautés, ou encore « Maintenant et pour l'éternité », « Cœurs brisés », « Missions impossibles »... Oui, une belle invention que cette libraire-là ! On souhaiterait qu'elle existe vraiment !
Re-hélas ! Alors qu'Emma dit mépriser la course au profit et fustige le marketing et ses dérives, elle transforme petit à petit son lieu de paix en vulgaire "concept store" où elle vend des DVD et des magnets, des fleurs et des parfums... Elle cède ainsi bien facilement aux sirènes du "merchandising" qu'elle décrie pourtant avec verve dans tout le roman ! Et puis, la "succes story" conte de fée de sa librairie-auberge-hôtel, franchement, on peine à y croire, c'est "too much" !
Enfin, pour finir sur une petite touche plus positive, il est agréable de se balader entre ces pages de Milan à New York en passant par Belle-Ile-en-Mer...
Un roman inégal donc, mais sympathique.
PS : il me FAUT, il me faut ABSOLUMENT une tasse «Chuuut... Je lis» !
PS 2 : j'ai ouvert se livre en me disant : chouette, un roman épistolaire ! J'aime bien ça moi, les romans épistolaires ! Mais en y réfléchissant bien, en guise de roman épistolaire, je crois n'avoir jamais lu que Les liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos... Et j'ai beau creuser mes petits méninges, aucun autre titre ne me vient à l'esprit... Vous en connaissez d'autres, vous, de romans épistolaires ?
______________________________
Paola Calvetti, L'amour est à la lettre A (Noi due come un romanzo), traduit de l'italien par Françoise Brun, éd. Presses de la Cité, 2009, 379 pages, 20 €.
Les avis de Karine :), YueYin, Cuné et Pom'.
Merci à Chez les filles et aux éditions Presses de la Cité de m'avoir envoyé ce livre.
20:57 | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : littérature, roman, amour, lettres, italie, new york
Commentaires
Aucun titre de roman épistolaire ? Non, ce n'est pas possible que tu sois passé à côté du délicieux "84, Charing Cross Road" d'Helene Hanff ! Si ???
Écrit par : Turquoise | 05/06/2009
merci pour votre analyse de mon roman! Et bien il faut abosulemnt lire 84 Charing Cross... Helene Hanff etait une soeur à nous!
paola calvetti
P.S. a propos: "Hélas ! Cette relation à distance par lettres interposées sonne indubitablement faux".
JE PEUT VOUS ASSURER QUE TOUS OU PRESQUE EST VRAI!!!
Écrit par : paola | 06/06/2009
Ah si comme moi tu avais rencontré Paola, tu serais convaincue de l'authenticité de nombre de choses. Billet chez moi demain normalement.
Écrit par : Stephie | 06/06/2009
Je viens de finir "Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates": une petite merveille de roman épistolaire!
Écrit par : Anne | 06/06/2009
Comme Anne, j'allais te dire "Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates". Et il y a aussi "Lady Susan" de Jane Austen.
Pour ma part, je n'en vois pas d'autres.
Pour en revenir au livre en lui-même, je suis d'accord avec les point négatifs que tu soulèves mais sans avoir pour autant été séduite par les points positifs, résultat, je n'ai pas aimé ce roman...
Écrit par : Restling | 06/06/2009
@ Turquoise : Ah mais "84, Charing Cross Road", ce n'est pas un roman, c'est un recueil de correspondance ! (Bon, j'avoue, je n'y pensais plus, alors que je l'ai lu et adoré !)
@ paola : merci d'être venue jusqu'ici !
Il est intéressant de savoir que presque tout est vrai, ce qui change l'optique du roman, mais j'aimerai en savoir plus : qu'est-ce que recoupe ce "presque tout" ? Les personnages ? L'histoire d'amour à distance ? Les lettres ? La librairie ?
Car je continue en trouver que certaines lettres sonnent "faux"...
@ Stephie : bon, je vais donc en savoir plus ! J'attends ton billet avec impatience !
@ Anne : Ah oui ! Ce livre est très présent sur la blogosphère actuellement, et j'ai bien envie de le lire.
@ Restling : Et "Lady Susan" : je note !
Écrit par : BlueGrey | 07/06/2009
Et l'adorable daddy long legs pour une correspondance à sens unique, ça marche?
Écrit par : keisha | 14/06/2009
@ keisha : "Daddy Long Legs" ? Je ne connais absolument pas ! Je vais donc regarder ça de plus près...
Écrit par : BlueGrey | 15/06/2009
Je peux te recommander "Oscar et la dame rose".
Oscar est un garçon de 10 ans, malade, hospitalisé et qui va mourir. Chaque jour il écrit une lettre à Dieu, lui raconte sa vie et sa façon de voir le monde.
Drôle, émouvant, touchant, génial (et pas totalement épistolaire, mais je n'ai pas toruvé mieux, 84 Charring Cross Road)
@Keisha : je suppose que le titre français est "Papa longue-jambe" de Jean Webster. Je me souviens avoir lu et apprécié, mais j'ai complètement occulté l'aspect épistolaire.
Belle histoire en tout cas d'après mon souvenir.
Écrit par : Tiphanya | 23/06/2009
J'ai tendance à adhérer à ton billet. Moi aussi j'aimerais bien aller faire un tour dans une telle librairie mais les points qui m'ont agacée sont un peu les mêmes que toi!
Écrit par : Karine :) | 02/07/2009
@ Tiphanya : merci pour ta suggestion de lecture. J'ai déjà entendu beaucoup de bien de "Oscar et la dame rose", le voici inscrit sur mon carnet de lectures !
@ Karine :) : une telle librairie, c'est le rêve de tout LCA ! ;-)
Écrit par : BlueGrey | 07/07/2009
Arghhhh, je ne l'ai toujours pas lu !!!
Écrit par : liliba | 23/08/2009
@ liliba : c'est pas bien grave, parce qu'il est bof ce livre-là !
Écrit par : BlueGrey | 24/08/2009
Les commentaires sont fermés.