23/02/2007
L'étranger – Albert Camus [1942]
« Aujourd'hui, maman est morte. »
Le roman se déroule en Algérie à l'époque où celle-ci est encore française. Meursault, le narrateur, un employé de bureau, va enterrer sa mère, sans larmes. Le lendemain en allant se baigner il rencontre Marie, une ancienne collègue, qui devient sa maîtresse. Puis Meursault devient l'ami de Raymond, son voisin de palier maquereau. Celui-ci l'invite à pique-niquer sur la plage, et tandis que les hommes se promènent, ils sont accostés par deux Arabes qui ont un compte à régler avec Raymond. Bagarre. Meursault regarde. Plus tard, retourné seul vers la source qui coule à une extrémité de la plage, Meursault y rencontre l'un des Arabes. L'Arabe – qui restera anonyme – sort un couteau et Mersault, qui a encore sur lui le revolver de Raymond, tire, tire encore, accablé par la chaleur et aveuglé par la lumière, la sueur et l'air brûlant.
« C'est alors que tout a vacillé. La mer a charrié un souffle épais et ardent. Il m'a semblé que le ciel s'ouvrait sur toute son étendue pour laisser pleuvoir du feu. Tout mon être s'est tendu, et j'ai crispé ma main sur le revolver. La gâchette a cédé, j'ai touché le ventre poli de la crosse et c'est là, dans le bruit à la fois sec et assourdissant, que tout a commencé. »
« J'ai tiré encore quatre fois sur un corps inerte où les balles s'enfonçaient sans qu'il y parût. Et c'était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur. »
Mersault est ensuite arrêté, jugé, et condamné à mort. Au cours du procès, on lui reprochera son absence d'émotion à la mort de sa mère et sa vie insouciante après le deuil. On comprend alors qu'il est condamné à mort pour ne pas s'être conformé aux normes de sa société.
« Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine. »
Mersault, le personnage principal de L'étranger, reste mystérieux : il ne se conforme pas aux normes de la morale sociale, et semble étranger au monde et à lui-même. Il se borne, dans une narration proche de celle du journal intime, à faire l'inventaire des évènements, de ses actes, ses envies et son ennui de manière froide et distante, sans les analyser. Il se contente de retracer son existence médiocre, limitée au déroulement mécanique de gestes quotidiens et à la quête instinctive de sensations élémentaires. Ses actes semblent être dictés par les éléments naturels extérieurs plutôt que par sa volonté propre. C'est ainsi que l'assassinat de l'Arabe ne répond pas à un instinct meurtrier mais trouve son mobile dans la chaleur suffocante, le soleil éblouissant et la lumière aveuglante. Pour Mersault les événements semblent s'enchaîner de manière purement hasardeuse en une sorte de fatalité. Il vit dans une sorte de torpeur, une étrange indifférence : au moment d'agir, il note d'ordinaire qu'on peut faire l'un ou l'autre et que « ça lui est égal. »
Dans la seconde partie du roman, Meursault est emprisonné et contemple sa mort en sursis. Il est alors obligé de réfléchir sur sa vie et son sens et est plus prolixe dans l'expression de ses sentiments et de sa révolte. On perçoit alors assez clairement la répugnance de Camus face à l'injustice et la peine de mort.
L'étranger est un roman d'Albert Camus paru en 1942. Il fait partie de son «cycle de l'absurde», trilogie composée d'un roman (L'étranger), d'un essai (Le Mythe de Sisyphe) et d'une pièce de théâtre (Caligula) décrivant les fondements de la philosophie camusienne : l'absurde.
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Albert Camus, L'étranger, éd. Gallimard, coll. Folio, 1972, 185 pages, 3,50 €.
12:05 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, roman, algérie, meurtre, peine de mort
15/07/2006
[photo] Harkis à vie ? - Julien Chapsal
Installation photographique et sonore de Julien Chapsal, Harkis à vie ? se propose de mettre en lumière la mémoire des Harkis qui émerge à peine de nos consciences 50 ans après la guerre d'Algérie. Il ne s'agit pas d'une démarche militante mais citoyenne, il ne s'agit pas de défendre une cause mais de susciter des questions en donnant simplement à voir et à comprendre.
Des femmes et des hommes, d'ages et d'horizons variés, posent devant l'appareil photo de Julien Chapsal, en simple témoins de leur appartenance. Des paroles accompagnent ces visages, extraits d'entretiens menés auprès d'eux : parfois redondantes, parfois contradictoires, elles évoquent la diversité des parcours et les sentiments de ces personnes unies par l'Histoire, renvoyant aux questions fondamentales de la mémoire, de l'identité et de la transmission générationnelle.
L'installation Harkis à vie ? a été conçue et présentée pour la première fois dans le cadre des Journées du Patrimoine 2005, au camp Joffre de Rivesaltes, où ont transité, à leur arrivée en France, la plupart des harkis et leur famille. Elle est visible jusqu'au 17 septembre aux rencontres photographiques d'Arles, à l'Atelier des Forges, et préfigure sa présence au mémorial de Rivesaltes. In situ, cette installation marquera l'aboutissement de ce travail en lui donnant toute sa résonance.
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Harkis à vis ? - Julien Chapsal
Du 4 juillet au 17 septembre 2006
Rencontres photographiques d'Arles (Atelier des Forges)
Exposition vue le 15/07/2006
02:25 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Arles, photographie, exposition, rencontres photographiques Arles, harkis, Algérie, Afrique