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11/06/2006

Le monde selon Garp - John Irving (1978)

medium_Garp.gifLe monde selon Garp est l'histoire d'un grand écrivain, pétri de talents, mais aussi bourré d'incertitudes, de complexes et de peurs. Garp insère dans le récit tragico-burlesque de sa vie des extraits de son oeuvre, mêlant ainsi la réalité à la fiction au sein même de la fiction. Ce procédé révèle que le monde est pour Garp un univers où c'est l'imagination qui règne. Le monde selon Garp montre un univers où les références sont inversées sans tabous : la mère a une virilité d'homme, Robert devient Roberta, les hommes mordent les chiens... Cependant, il reste quelque chose de sacré, un havre de paix : la famille.

Le monde selon Garp est donc le roman d'un romancier, mais un romancier fréquemment atteint de leucoselophobie chronique qui l'empêche d'écrire. Alors, de quoi donc peut parler un roman dont le personnage principal est un écrivain qui n'arrive pas à écrire ?

De la "concupiscence" d'abord. Dans Le monde selon Garp les personnages (surtout les hommes) sont malades de concupiscence et la concupiscence mène à peu près tous les personnages à une triste fin. Qu'ils en soient coupables ou victimes, ils en perdent des yeux, des bras, des langues, quand ce n'est pas le pénis. Discours hautement répressif de l'auteur sur la concupiscence ? Non. Plutôt discours totalement décalé, légèrement déjanté, à la fois burlesque et jubilatoire !

Ce roman traite aussi du "Crapaud du Ressac", métaphore de cette angoisse sourde qui rode toujours dans nos vies, qui se fait oublier parfois, dans un moment heureux, pour mieux ressurgir et nous nouer les tripes... Cette peur de la mort ou plus précisément cette peur de voir mourir ceux que l'on aime. Tout, jusqu'au détail le plus infime, dans ce roman, est une expression de la peur. Alors, comment s’étonner que Garp définissent le romancier comme un médecin qui ne voit que des incurables ? Dans Le monde selon Garp, nous sommes tous des Incurables.

Si Le monde selon Garp m'a autant marqué, c'est sans doute parce que, à grand renfort de péripéties facétieuses et d'incidents rocambolesques, Irving nous y montre une réalité toute simple, pétrie d'espoir, de rêve et de désillusion, tout ce qui fait grandir les hommes dans le monde d'aujourd'hui. Ce réalisme s'accompagne souvent de sexe, de violence, d'amour et de haine, de tendresse et de poésie aussi, le tout enrobé d’un humour irrésistible, teinté de dérision et d'un petit grain de folie. Les personnages sont singuliers, subtils et complexes, les sentiments qu'ils expriment, simples et exacts, l'histoire est drôle, touchante et déchirante en même temps. Bref, une fois le livre finit, Le monde selon Garp vous trotte longtemps dans la tête... Signe d'un grand roman !

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e%2040.gif John Irving, Le monde selon Garp, éd. du Seuil, coll. Points, 1998, 680 pages, 8,50 €.

Du même auteur : L'Epopée du buveur d'eau, Une veuve de papier & Dernière nuit à Twisted River.