27/06/2007
Le dernier souper – Shûsaku Endô (1959-1985)
Shûsaku Endô est né à Tokyo en 1923 et lorsque ses parents divorcent il est élevé par sa mère, une femme très catholique qui le fait baptiser en 1935 sous le nom de Paul. Mais être catholique au Japon dans les années 1930 n'était pas très bien perçu et donc pas toujours facile à vivre. A leur lecture on sent que c'est de son vécu et de son expérience que Shûsaku Endô a nourrit les trois nouvelles de ce court recueil dans lequel il questionne la place de la foi chrétienne au Japon, pays aux traditions ancestrales mais résolument tourné vers l'avenir.
Dans le premier récit, Les ombres, le narrateur rédige une lettre au prêtre qui a fait son éducation, une lettre entre amertume et admiration pour un homme en apparence fort de sa religion, mais qui a fauté. «Je ne sais pas si je vous enverrai cette lettre. Je vous en ai déjà écrite trois, mais ou je me suis arrêté en route, ou je les ai fourrés dans le tiroir de mon bureau sans jamais les poster.» Au final, on ne sait si le narrateur blâme ou comprend son ancien mentor, sans doute ne le sait-il pas vraiment lui-même...
Dans la seconde histoire, Le retour, le narrateur, à l'occasion de l'exhumation de sa mère, s'interroge sur la place que notre vie laisse à la mort, sur les choix qui déterminent nos vies, et sur la nécessité du retour pour les expatriés. «A droite de la pierre étaient gravés le nom et la date du décès de ma mère et, à côté, ceux de mon frère. Je contemplai avec émotion les deux inscriptions et remarquai qu'il restait un grand vide sur la gauche... Oui, un jour, mon nom gravé près des leurs.»
Enfin dans la troisième nouvelle, Le dernier souper, on se demande quel secret Tsukada tente d'oublier – ou d'expier – dans l'alcool. «Etre médecin ne constitue pas une profession, c’est la même chose qu’être prêtre, avec la mission de porter la misère du monde.» Malheureusement son épilogue mélodramatique a ôté tout l'intérêt que j'avais retrouvé pour ce livre grâce à cette nouvelle.
L'écriture sobre de Shûsaku Endô mêle fiction et introspection mais n'évite malheureusement pas l'écueil du pathétique dans ces trois nouvelles, marquées par la souffrance d'un catholicisme vécu tel un fardeau par le narrateur, entre péché et obsession du rachat.
BlueGrey
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Shûsaku Endô, Le dernier souper, traduit du japonais par Minh Nguyen-Mordvinoff, éd. Denoël, coll. Folio, 2003 (1959-1985), 107 pages, 2 €.
13:30 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : littérature, nouvelle, Japon, prêtre, religion, catholicisme
Commentaires
C'est certainement un bon livre, mais je ne pense pas qu'il me plaira, il révèle un aspect trop pathétique pour moi ! :-(
Écrit par : Florinette | 28/06/2007
Super ! J'adore les auteurs japonais... et celui-ci me semble être proche d'Ogawa et de Yoshimura, que j'aime beaucoup !
Écrit par : Lou | 30/06/2007
@ Florinette : certainement un bon livre, oui, mais au final j'en garde un souvenir assez mitigé.
@ Lou : j'ai beaucoup aimé "Naufrages" de Yoshimura, un conte philosophique sombre et cruel... Et je n'ai encore rien lu d'Ogawa, mais le voilà inscrit sur ma liste! ;-)
Écrit par : BlueGrey | 02/07/2007
J'ai été assez déçue dans ce recueil, ou je n'ai pas trouvé grand chose, il y a même des choses que j'ai l'impression de ne pas avoir compris...
Écrit par : akialam | 01/07/2009
@ akialam : idem ! Nous sommes bien d'accord...
Écrit par : BlueGrey | 07/07/2009
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